Trahison

Des agents de l'ordre ont fait échouer, dans la soirée du mercredi, une tentative d'immolation par le feu de trois jeunes. » En dépit de la teneur de l'information sur les raisons inavouées et de la concordance des révélations, ce fait nous renvoie à cette réalité vécue par beaucoup dans leur chair. Les jeunes en premier. En effet, nous sommes habitués à être abreuvés de nouvelles sur des cas de suicide, dont ont été le théâtre de paisibles et recluses régions de l'intérieur du pays ou, comme l'aime à l'appeler une certaine presse bien excitée « le pays profond », à l'opposé de cette Algérie utile. Le suicide, convenons-en, n'a pas de coloration régionaliste, contrairement aux supputations des bien-pensants. Le phénomène du suicide atteint des « pics » dans tel endroit plus que dans tel autre. Toutefois, il n'épargne aucune région tant le dénuement est partout. C'est le cas d'ailleurs de la capitale. Ce geste, expliqué sous cet angle, nous renseigne, s'il en est, sur le degré de déliquescence atteint par la société et surtout sa frange la plus fragile que sont les jeunes. Ne savant à quel saint se vouer, ils s'adonnent, pour les moins nantis d'entre eux, à des pratiques plus que funestes et nuisibles à la santé. L'ingéniosité ne manque pas à ces jeunots, puisqu'ils trouvent souvent « la petite chose » pour se griser à petit frais. Les pouvoirs publics semblent ne pas trop faire cas de la santé de ces corps menus qu'on trouve décharnés sous les arcades de la capitale. « Ils » ne se souviennent de leur destin cahoteux que pour leur ressasser la rengaine éculée de programmes ronflants. Cela n'arrangera en rien le vécu incommodant de ces laissés-pour-compte. C'est ainsi qu'une politique plus intentionnée et moins démagogique doit être enclenchée par les autorités compétentes. Aussi la société civile doit-elle s'en mêler. Celle-ci devait, tout compte fait, être plus près des réalités sociales. La frange juvénile ne se porterait que mieux.

Iddir Nadir
El Watan
29 janvier 2006