Le «Subutex» mis à l'index

Les interventions menées sur le terrain nous ont déjà permis de réaliser une cartographie des sites de localisation des usagers de drogues injectables et ont permis d’estimer leur nombre entre 600 et 1000 dans la seule wilaya d’Annaba.

«Ce chiffre est déjà considérable et en contradiction avec l’idée reçue réduisant le phénomène à quelques pratiques individuelles isolées». C’est ce qu’a déclaré à Annaba le Dr Réda Kettache, directeur du Programme de réduction des risques à l’association AnisS de lutte contre les IST/sida et de la promotion de la santé, en marge d’un séminaire atelier de formation des animateurs et «travailleurs de rue» associatifs à la réduction des risques liés à la drogue et au sida.

Le même médecin a expliqué ce fait en affirmant que «le Subutex est à la base un traitement de substitution contre la toxicomanie. Il est beaucoup plus accessible et aujourd’hui la 1re  drogue injectée à Annaba et en Algérie, dépassant de loin la consommation de cocaïne ou d’héroïne, qui sont les drogues dures traditionnelles». Actuellement, un programme expérimental d’échange de seringues donne accès à 200 personnes de la communauté aux services de prévention et de réduction des risques liés à l’usage des drogues injectables.

Organisé les 15 et 16 mars par l’association AnisS avec le soutien du Fonds solidaire de développement, ce rendez-vous de formation regroupe 25 participants issus des associations activant dans le domaine de la prévention et la prise en charge des drogues dans les milieux de jeunes à Annaba dont les associations de lutte contre la toxicomanie de la wilaya de Annaba, Infocom Annaba et Guelma, AAOJ, Ikram et les clubs scientifiques de l’ODEJ de la même ville.

Animé par le Pr Madjid Tabti du service de psychiatrie médico-légale et soins aux toxicomanes de l’hôpital Frantz Fanon de Blida, ce séminaire a pour objectif d’expliquer le lien étroit entre l’usage de la drogue et le sida, d’identifier les défis à la prise en charge globale des usagers de la drogue injectable en Algérie, et enfin de mettre en place une stratégie associative pour renforcer la prévention des risques liés aux drogues et au sida.

Plusieurs personnes usagères de drogue injectable ont donné leur témoignage lors de cette rencontre qui entre dans le cadre d’un projet de prévention et de réduction des risques des drogues et du sida dans les régions d’Annaba et de Tamanrasset. Une action que mènent les ONG  AnisS et Green Tea, et ce, en extension à un 1er projet pilote mis en place l’année dernière avec le soutien du Menahra/OMS. Selon plusieurs estimations, 30 à 40 des usagers de drogues injectables seraient atteintes de VIH ou d’hépatite en Algérie.

A ce propos, le Dr Scander Soufi, président d’AnisS, annonce que «le nouveau Plan stratégique national sur le sida 2013/2015 prévoit la distribution de matériel stérile aux usagers de drogue injectable. Ce qui leur permet de se protéger du VIH et des hépatites. Mais il est impératif de passer en revue l’ensemble du dispositif national de prise en charge de l’usage de la drogue et d’identifier les défis pour une meilleure adéquation avec les nouvelles configurations et dynamiques du phénomène en Algérie».

Gaidi Mohamed Faouzi

El Watan le 17 mars 2013