Le Prix Maghrébin Bensmail

Le Prix Maghrébin d'excellence de Psychiatrie Belkacem Bensmail 2014, a été décerné au Dr Aïcha Dahdouh-Guermouche (CHU d'Oran) pour son travail intitulé : " Consanguinité, schizophrénie et trouble bipolaire".
Le prix d'encouragement a été attribué au Dr Messaouda Bensaida (Annaba) pour son travail sur les troubles anxieux en population générale.
Les prix ont été remis aux deux lauréates à l'occasion du 33ème Congrès Franco-Maghrébin de Psychiatrie qui s'est déroulé du 20 au 22 novembre 2014 à Fès (Maroc)

C’est à l'occasion du 33e congrès franco-maghrébin de psychiatrie qui a eu lieu au mois de novembre 2014 à Fès (Maroc) que le Dr Aïcha Dahdouh-Guermouche, maître de conférences «B» en psychiatrie, service des urgences psychiatriques du CHU d'Oran, a obtenu le prix d’excellence pour son travail de recherche sur «Consanguinité, schizophrénie et trouble bipolaire».
Il s’agit du prix maghrébin de psychiatrie «Belkacem Bensmaïl» qui a été institué en reconnaissance aux efforts inlassables fournis, quarante années durant, par le professeur Belkacem Bensmaïl (1931-2002), ancien médecin-chef de la clinique de psychiatrie et de psychologie médicale du CHU de Constantine, au service du développement et de la promotion de la psychiatrie algérienne, notamment dans les domaines de la santé publique, de la formation médicale et de la recherche scientifique.
Ce Prix maghrébin de psychiatrie «Belkacem Bensmaïl» est décerné dans toute ville du Maghreb accueillant le Congrès franco-maghrébin de psychiatrie et ce conjointement à l’association des psychiatres de la wilaya de Constantine et l’Association algérienne d’épidémiologie psychiatrique, sous le parrainage de la Société algérienne de psychiatrie. Cette distinction dont a été gratifiée Mme Aïcha Dahdouh est le résultat des efforts fournis par ce docteur en sciences médicales, faculté de médecine d’Oran (Algérie) qui a suivi un parcours brillant depuis l’obtention en 1998 de son baccalauréat sciences naturelles et vie (mention bien). Ainsi, après un diplôme d’études médicales générales, elle s’est spécialisée en psychiatrie. Obtenant par la suite son diplôme de thérapie familiale et pratique de réseaux (mention très bien), elle a été admise en 2011 au concours de maître-assistant hospitalo-universitaire en psychiatrie (enseignante de psychiatrie à la faculté de médecine d’Oran).
Depuis avril 2014, Mme Dahdouh occupe le poste de maître de conférences «B» en psychiatrie- service des urgences psychiatriques, CHU Oran. Son travail autour de la consanguinité, schizophrénie et trouble bipolaire lui a valu ce prix d’excellence.
Amel Bentolba

Entretien avec le Dr Aïcha Dahdouh :
«La consanguinité a des conséquences sur la santé physique et mentale»

Sujet de ses différentes recherches, qui lui ont valu le prix d’excellence du prix maghrébin de psychiatrie «Belkacem Bensmaïl» 2014, Mme Aïcha Dahdouh, maître de conférences «B» en psychiatrie service des urgences psychiatriques CHU d'Oran, évoque avec nous les contours de son travail autour de la consanguinité et ses conséquences sur la santé.

Le Soir d’Algérie : Selon votre étude, pensez-vous que le mariage consanguin est toujours aussi répandu en Algérie ?
Dr Aïcha Dahdouh
: Ces unions sont encore fréquentes et constituent des pratiques très répandues en Algérie et dans les autres pays du Maghreb. Selon les données de la fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche dans une étude menée en 2007, les mariages consanguins représentent plus de 38% de l’ensemble des mariages en Algérie. Ces pratiques ancestrales sont favorisées par des traditions et pratiques culturelles, plus particulièrement en milieu rural.
Quelles conséquences ont ces unions sur la santé, notamment celle des enfants issus de ces mariages consanguins ?
Leurs conséquences sur la fréquence des maladies à déterminisme génétique sont importantes et constituent un véritable problème de santé publique. A partir des données de nombreuses études menées dans différents pays, il apparaît chez les enfants issus de cousins germains un excès de mortalité infantile et périnatale de 3.5% en moyenne par rapport au reste de la population. Le risque de malformations congénitales dans les mariages entre cousins germains est estimé à 2-2,5 fois le taux en population générale; l’hydrocéphalie, la syndactylie post-axiale, la fente vélo-palatine et certaines malformations cardiaques sont les plus répandues. Le principal impact de la consanguinité réside dans l’augmentation d’incidence des maladies autosomales récessives.
Il existe près de 577 maladies récessives rapportées dans la littérature scientifique internationale chez des familles arabes ; la mucoviscidose, l'amyotrophie spinale et l'ataxie de Friedrich sont les plus fréquentes.
Est-il vrai que parmi les conséquences, il y a celles qui causent des troubles mentaux ?
Il est suggéré ces dernières années et depuis le développement de travaux de recherche en génétique moléculaire chez les populations consanguines, que les mariages entre apparentés seraient également incriminés dans l’augmentation des maladies complexes, multifactorielles telles que l’hypertension artérielle, le cancer, l’asthme et les troubles mentaux.
En effet, les études d’épidémiologie génétique auprès de populations consanguines confirment l’existence d’un lien significatif entre consanguinité et troubles mentaux et l’augmentation du risque de schizophrénie et de troubles bipolaires dans la descendance de parents consanguins.
Face à ces constats, quelles sont les mesures à prendre ?
L’ensemble de ces éléments imposent la mise en place de politiques de prévention sous forme de campagnes de sensibilisation à l’échelle nationale visant à informer la population des risques liés aux mariages consanguins. Ils doivent également conduire à la mise en place de consultations spécialisées de conseil génétique à l’échelle du pays.
A. B.

Le Soir d'Algérie 07 décembre 2014